jeudi 30 septembre 2010

Non au fichage anthropométrique des Roms !

Communiqué

Le 30 septembre 2010

Le 28 septembre 2010, à Méry-sur-Oise, sur la Butte de Montarcy, une opération de police judiciaire a conduit les services de la gendarmerie à effectuer des mesures biométriques sur les personnes de Roms séjournant, sur un terrain en friche.

Tous les Roms adultes ont subi un véritable fichage avec photographies, de face et de profil, prise d’empreintes palmaires et digitales, enfin prélèvements de salive permettant le relevé des empreintes génétiques. (Le Fichier national automatisé des empreintes génétiques, ou FNAEG, créé en 1998, est un fichier commun à la police nationale française et à la gendarmerie nationale française, qui gère les traces d'ADN prélevées au cours des enquêtes).

http://www.rue89.com/files/20080724berluroms.jpg
Relevé d'empreintes digitales : suivons-nous l'exemple de Berlusconi ?

Les informations recueillies, confidentielles, sont censées concerner des personnes susceptibles d’avoir commis des délits et le seul fait d’avoir participé, « en réunion », à un stationnement illicite, est considéré comme un délit.

Le Collectif de soutien aux familles rroms de Roumanie considère qu’un fichage, même légal, peut être illégitime et illicite, c’est-à-dire immoral. L’éthique précède la loi. La criminalisation des Roms, quoi qu’ils fassent, est une discrimination que réprouvent nombre d'instances internationales et qu'a récemment déplorée la Commission européenne .

Il s’agit, selon nous, d’un fichage des Roms et donc d’un fichage ethnique qui est à rapprocher des fichages anthropométriques des Tsiganes réalisés, en France, de 1912 à 1969. Cette vieille pratique raciste, abandonnée au siècle dernier, doit être condamnée, sans réserve, par tous les citoyens attachés au respect des êtres humains. Elle est incompatible avec notre démocratie elle-même.

Avec le soutien et la participation de citoyens d’Ile de France
d’ASET 95, la Ligue des Droits de l’Homme et le Secours Catholique.


http://medias.lepost.fr/ill/2010/09/01/h-20-2202563-1283331807.jpg
Comme au siècle dernier, de 1912 à 1969...

Voir : http://www.ressources-solidaires.org

jeudi 23 septembre 2010

Antisarkozystes hier, antiroms aujourd'hui...?

Communiqué, envoyé à la presse, ce jour :

Les élus qui hurlent contre la politique discriminatoire du gouvernement à l'égard des Roms et qui, en même temps, les assignent devant les tribunaux pour « stationnement illicite » sont inconséquents et, en dépit de leurs prises de position publiques, demeurent impitoyables.

En l'occurrence, dans le Val d'Oise, dans l'Agglomération de Cergy-Pontoise, il s'agit de faire condamner des familles, installées depuis de nombreuses années en France, en situation administrative régulière, mais n'ayant jamais trouvé où vivre, où arrêter les caravanes inaptes au voyage dans lesquelles ils séjournent. Où qu'ils fassent halte on les expulse donc !

Parmi les personnes qui sont là, sur le territoire de Liesse, à Saint Ouen l'Aumône, plusieurs dizaines de fois contraintes de se déplacer, le long du « Chemin de la Haute Vacherie » (ça ne s'invente pas !), dans les friches rurales ou industrielles de la Plaine dite de Pierrelaye, il est un homme, arrivé en 1982 (déserteur de l'armée de Ceausescu, à l'époque), une de ses filles, (née en France, en 1992, et naturalisée française), et sa sœur (une dame âgée, dont l'époux et plusieurs membres de sa familles furent tués, lors d'un accident de la route, en 2002, suite à un mauvais attelage de caravane, après une expulsion de la forêt d'Achères).

Voilà, parmi d'autres, qui sont les indésirables auxquels la Communauté d'Agglomération de Cergy Pontoise ne laisse aucun répit ! Chassés de Liesse, de Neuville, de la zone d'activités des Béthunes, de la Plaine de Pierrelaye, les Roms sont épuisés, ne sachant plus ni que dire ni que faire, mais voulant farouchement faire leur vie ici.

Assignés « en référé d'heure à heure » (est-ce si urgent, y a-t-il péril ?), les Roms ont reçu, le 21 septembre, des mains d'un huissier, une convocation devant le Tribunal de Pontoise, le 24 septembre, dès 9h. 30 ! Un avocat a été averti, in extremis, sinon ils allaient se retrouver sans conseil devant le Juge !

Qu'on cesse de parler des Roms pour les plaindre, si l'on ne recherche, pour régler leurs installations illicites, aucune autre solution que judiciaire ! En pratique, on s'aligne sur ce que sont chargés d'exécuter Messieurs Hortefeux et Besson ! La limite de l'hypocrisie est ici atteinte et Monsieur Dominique Lefèvre, président de l'Agglomération, pourrait pourtant, s'il veut ne pas entrer en contradiction avec lui-même, intervenir pour qu'on laisse aux Roms le temps de respirer !

À quoi servent, en effet, ces protestations et cette énorme vague d'informations visant à faire prendre en considération le sort des Roms, si rien jamais ne change ! Une fois retombée la fièvre médiatique, allons nous nous retrouver dans la situation antérieure, ou pire ?

Jean-Pierre Dacheux, animateur du Collectif de soutien aux familles rroms de Roumanie.
Jean-Claude Vitran, de la Ligue des Droits de l'homme.


Le 23 septembre 2010.

mercredi 22 septembre 2010

OSCAR ou le déni de citoyenneté européenne des Roms

Communiqué commun du GISTI, d'IRIS et de la LDH - 21 septembre 2010

La Résolution adoptée le 7 septembre par le Parlement européen sur la situationdes Roms et la libre circulation des personnes dans l'Union européenne renforce considérablement la vague de protestations déjà exprimées, en France et à l'étranger, contre la campagne xénophobe menée par le gouvernement français contre les Roms.

S'agissant particulièrement du fichage biométrique des Roms, la Résolution «souligne que le relevé des empreintes digitales des Roms expulsés est illégal et contraire à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne [...], aux traités et au droit de l'Union européenne [...], et qu'il constitue une discrimination fondée sur l'origine ethnique ou nationale ».

C'est pourtant précisément ce que la France se propose de faire très prochainement. Certes, le fichier OSCAR, dont la légalité a été contestée devant le Conseil d'État, vise l'ensemble des étrangers susceptibles de bénéficier d'une aide au retour. Mais, en pratique, ce sont majoritairement les Roms, qu'ils soient ressortissants bulgares ou roumains, qui sont visés puisqu'ils représentent 90% des personnes qui se voient attribuer une aide au retour « humanitaire ». La raison en est simple : les pouvoirs publics ont développé une stratégie consistant, lors de l'évacuation d'un campement de Roms roumains ou bulgares, à leur forcer la main pour qu'ils acceptent l'aide au retour « humanitaire », sous peine d'être placés en garde à vue ou d'encourir des poursuites pénales.
Afficher l'image en taille réelle
Le fichage biométrique des Roms, qui prend un relief particulier dans le contexte actuel, constitue un déni inacceptable de leur citoyenneté européenne. C'est là une raison supplémentaire et urgente de faire constater l'illégalité du fichier Oscar.

Devant l'imminence de la mise en oeuvre de la biométrie dans le fichier OSCAR, le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), l'association Imaginons un réseau Internet solidaire (IRIS) et la Ligue des droits de l'homme (LDH) ont demandé, le 31 août dernier, au Conseil d'État d'accélérer l'instruction de leur recours contre le décret de création de ce fichier.

Le GISTI, IRIS et la LDH se félicitent de voir leur requête entendue. Commel 'analysent les associations dans leur note complémentaire, OSCAR représente aujourd'hui un danger immédiat et massif pour les Roms, tout en demeurant un outil de biopolice des étrangers non européens.




[Adresse de ce communiqué sur le web: http://www.iris.sgdg.org/info-debat/comm-oscar0910.html


vendredi 17 septembre 2010

Une expulsion "exemplaire

Cela se passe à Méry sur Oise (Val d'Oise), en ce début su mois de septembre. Quelques familles roms y étaient installées en contrebas de l'autoroute A115. Elles étaient là, depuis plusieurs mois, régulièrement, suite à une décision de justice.

La DIRIF (1), propriétaire du terrain avait, en effet, intenté un procès contre les Roms et l'avait perdu, car l'isolement, la non utilisation et la non dangerosité du lieu avait été démontrés à l'audience. La DRIEA (2), nouvel organisme propriétaire, n'aura pas à faire appel : les menaces d'expulsions des gendarmes ont suffi à faire partir ces familles bien insérées. Expulsion du terrain (sous 48 h.) et expulsion de France, si n'est pas respectée l'obligation d'avoir à quitter le territoire français (l'imprimé OQTF) distribuée à certains occupants !

Les familles, avec enfants en bas âge, une jeune fille handicapée, (en soins, avec opérations successives) venaient de subir un premier traumatisme suite à un incendie survenu, dans la nuit, sans qu'on en connaisse l'origine (oubli d'une bougie allumée, acte de malveillance)...

Des pères de familles travaillaient. Des enfants étaient scolarisés. Des nouveaux nés étaient suivis à la PMI. Aucune hostilité dans le voisinage. Des rapports d'amitié et de solidarité avec des habitants de la commune, notamment, étaient apparus.

Mais voilà, la direction de la DIR prétextant, contre toute évidence, que l'incendie avait menacé les automobilistes de passage sur l'autoroute, avait ordonné de faire disparaitre toute présence habitée de cet espace placé sous sa responsabilité. La gendarmerie appuyant cette décision, donc avec l'accord de l'administration préfectorale, avait exigé une évacuation sous 48 heures, afin que puissent intervenir les engins nécessaires pour nettoyer les lieux.

Second traumatisme et peur de se retrouver sans abris et sans possibilité d'en reconstruire de nouveaux !




(1) Le 1er juillet 2010, la DRIEA a été créée. Ce qui suit n'est pas un canular ! Voir : http://www.dir.ile-de-france.developpement-durable.gouv.fr
"Placée sous l’autorité du préfet de Région, la DRIEA est issue de la fusion de la Direction Régionale de l’Equipement d’Ile-de-France (DREIF) hormis dans sa dimension logement, de la Direction des Routes d’Ile-de-France (DIRIF), des Directions Départementales de l’Equipement (DDE) des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne et de la Direction de l’Urbanisme du Logement et de l’Equipement (DULE) de Paris. Conformément à la circulaire du Premier ministre du 27 juillet 2009, elle constitue l’une des trois directions du MEEDDM, aux côtés de la DRIHL et de la DRIEE".

(2)
Direction régionale interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement. Voir : http://www.driea.ile-de-france.developpement-durable.gouv.fr/

mercredi 15 septembre 2010

Avec l'enfant rrom de Saint-Étienne

L' enfant qui vit sous cet arbre est en France depuis plusieurs années.
L' enfant qui vit sous cet arbre poursuit une scolarité des plus conventionnelles ...
École primaire , CE2..., lire, compter ... jouer ,
dans l'une des écoles de notre ville .
Sa sœur est rentrée au collège.
Mais cet enfant se cache, tout comme sa soeur, tout comme leur mère,
sous des bâches, à la périphérie de la ville,
loin des regards de la Préfecture, de la Police , de la Mairie.
Jusques à quand , cela va-t-il tenir ?
Il n'y a plus que sous cet arbre qu'on peut trouver refuge à Saint-Étienne.
L' enfant veut aller à l' école ; l' enfant va à l' école.
Pas simple de faire quelques écritures sous un arbre.

Et voilà que le temps se gâte ...

Texte et photo : Marie-Pierre Vincent

mardi 14 septembre 2010

Les Roms ne s'installent que sur des "stationnements illicites", alors...

http://parisbanlieue.blog.lemonde.fr/files/anpeste_1.jpg
Manger l'herbe d'autrui ! quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.

On ne coupera plus les épicéas mais seulement... les arbres de Noël qui poussent en forêt et qui ont des aiguilles. On ne chassera plus les écureuils mais seulement... les rongeurs à longue queue qui sautent d'un arbre à l'autre. On cessera d'empêcher les hirondelles de nicher sous les toits mais seulement... les oiseaux qui se posent par dizaines sur les fils électriques quand approche l'automne.

Le temps est venu où il faut apprendre à ne plus appeler un chat un chat, quand on le poursuit !

Le Ministre Hortefeux, avec cynisme et détermination, a supprimé une circulaire de son Ministère, adressée aux Préfets, qui accordait la préférence aux Roms, quand il s'agit de procéder à des expulsions. Une autre circulaire la remplace qui se contente de demander aux préfets et flics de France de s'en prendre aux stationnements illicites, quels que soient les occupants. Le bon apôtre ! Rien ne change que les mots. Tout le monde a compris : continuez à chasser le Rom, cet animal qui s'installe n'importe où, forcément de façon illicite, puisque nulle place ne lui est réservée !

Aurait-on jamais cru, voici quelques mois, que les Roms occuperaient le devant de la scène médiatique, par volonté d'État, et cela si longtemps ? Depuis un mois et demi, le pouvoir s'évertue à mettre en œuvre une politique que même ses amis de la droite européenne récusent. Les plus hautes autorités internationales ont beau émettre des réserves prudentes ou des condamnations franches, rien n'y fait : on tient le coupable symbolique, celui qui peut cristalliser toutes les angoisses sécuritaires des Français. On ne le lâchera pas.

Au secours La Fontaine, toi qui stigmatisait le Prince (le Lion !) qui, avec sa cour de fauves accusait, en pleine crise (la peste), ... "ce pelé, ce gâleux dont nous vient tout le mal". Et oui, encore et toujours, "selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. C'est décidé : blanc est Éric Woerth, noir le Rom qui ose occuper des friches industrielles ou rurales, où le stationnement est "illicite" !

Oh la belle expression que celle-là : "stationnement illicite" ! Le sol qu'occupe un "misérable" (celui qui vit dans la misère et la délinquance qui s'en suit, eut dit Hugo!) est-il à l'abandon, sans occupant, voire sans voisin, insalubre, pollué, inutilisable à court et moyen terme ? Peu importe : il a un propriétaire. Le propriétaire tolère-t-il cette occupation ? Il a tort et l'État fera respecter la loi. Le stationnement est illicite et donc, avec (ou sans !) le concours de la justice, on remet de l'ordre dans cet espace que, de surcroît, les Rroms vont polluer plus encore puisqu'on les laissera sans eau, sans poubelles et sans latrines, en attendant l'organisation de l'expulsion.


Le Pot de fer proposa
Au Pot de terre un voyage.

Dans ce voyage (vers la Roumanie ?) du pot de fer entrainant le pot de terre (encore La Fontaine !), la fausse sollicitude du pot de fer choque, entrechoque et casse, certes, le pot de terre, mais c'est le pot de fer qui va se bosseler, rouiller, se vider, pour finalement aller rouler dans le bas côté de l'histoire. Quant au pot de terre, à peine est-il en mille morceaux qu'il s'en remodèle un autre, avec la bonne argile de notre terre. Les pots de terre sont, finalement, plus durables que les pots de fer et ce ne sont pas les archéologues qui diront le contraire.

samedi 11 septembre 2010

Roms en France : discrimination et mensonge !

Tout est dit...

Une circulaire du ministère de l'Intérieur aux préfets sur les "évacuations de campements illicites", dont l'AFP a obtenu une copie, cible expressément les Roms, contrairement aux assurances données jeudi à ce sujet par le ministre de l'immigration Eric Besson.

En préambule, cette circulaire, datée du 5 août 2010 et signée par Michel Bart, le directeur de cabinet du ministre de l'intérieur, rappelle aux préfets les "objectifs précis" fixés par le président Nicolas Sarkozy: "300 campements ou implantations illicites devront avoir été évacués d'ici trois mois, en priorité ceux des Roms".

"Il revient donc, dans chaque département, aux préfets d'engager (...) une démarche systématique de démantèlement des camps illicites, en priorité ceux de Roms", dit le texte.

"Les préfets de zone s'assureront, dans leur zone de compétence, de la réalisation minimale d'une opération importante par semaine (évacuation / démantèlement / reconduite), concernant prioritairement les Roms", poursuit la circulaire qui est accompagnée d'un tableau type.

La circulaire faisait suite aux décisions prises par Nicolas Sarkozy fin juillet, qui visaient déjà les Roms. "J'ai demandé au ministre de l'intérieur de mettre un terme aux implantations sauvages de campements de Roms, ce sont des zones de non-droit qu'on ne peut pas tolérer en France", avait affirmé Nicolas Sarkozy.

Face aux critiques du parlement européen sur les récentes reconduites à la frontière, M. Besson a assuré jeudi dans un communiqué que "la France n'a pris aucune mesure spécifique à l'encontre des Roms".

"Les Roms ne sont pas considérés en tant que tels mais comme des ressortissants du pays dont ils ont la nationalité", a-t-il affirmé en assurant que la France "ne met en oeuvre aucune expulsion collective.

http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5jhvCtZIFz6CnwuOZ_Yz---Fv3n7w

Voir aussi : http://www.mediapart.fr/club/edition/les-invites-de-mediapart/article/110910/hortefeux-le-racisme-en-circulaire

http://www.lexpress.fr/medias/1079/552545_les-roms-expulses-se-mobilisent-a-montreuil.jpg

jeudi 9 septembre 2010

Le Parlement européen demande à la France de «suspendre immédiatement» les expulsions de Roms

Le Parlement européen a adopté ce jeudi une résolution demandant à la France et aux autres Etats de l'UE de «suspendre immédiatement» les expulsions de Roms, qui ont suscité une vive controverse ces dernières semaines.

>> Les expulsions de Roms en images, c'est par ici avec notre diaporama.

Cette résolution présentée par les socialistes, les libéraux, les verts et les communistes a obtenu 337 voix contre 245. Elle a été adoptée alors qu'Eric Besson et Pierre Lellouche sont en Roumanie pour demander aux dirigeants du pays de mettre en place un «plan national d'urgence» pour intégrer les citoyens roms leur territoire.

Le Parlement se déclare «vivement préoccupé par les mesures prises par les autorités françaises ainsi que par les autorités d'autres Etats membres à l'encontre des Roms et des gens du voyage prévoyant leur expulsion».

J. M. avec AFP


France Info - 13:06

Strasbourg demande à la France de "suspendre immédiatement toutes les expulsions de Roms". Une résolution adoptée au moment où les ministres Eric Besson et Pierre Lellouche sont justement en Roumanie pour défendre la politique du gouvernement à l’égard des Roms.

Les mots sont particulièrement durs : le Parlement "s’inquiète vivement de la rhétorique provocatrice et ouvertement discriminatoire qui a marqué le discours politique au cours des opérations de renvoi des Roms dans leur pays". Aux yeux des eurodéputés, cela "donne de la crédibilité à des propos racistes et aux agissements de groupes d’extrême droite". Le Parlement européen demande donc à la France de "suspendre immédiatement toutes les expulsions de Roms".

Présentée par une coalition de la gauche et des libéraux du Parlement, cette résolution a été adoptée par 337 voix contre 245 et 51 abstentions.

Paris demande à Bucarest un "plan national d’urgence"

Et elle tombe plutôt mal pour le gouvernement : le ministre de l’Immigration Eric Besson et le secrétaire d’Etat aux Afffaires Européennes Pierre Lellouche sont actuellement en Roumanie pour discuter de la situation des Roms. A Bucarest, l’accueil n’a sans doute pas été chaleureux : la Roumanie a plusieurs fait savoir qu’elle n’appréciait guère la politique de la France à l’égard de cette communauté. La visite, qui devait durer deux jours, a d’ailleurs été écourtée de moitié...

Les deux ministres ont demandé à la Roumanie de mettre en place un "plan national d’urgence" pour intégrer les citoyens roms sur son territoire... y compris ceux renvoyés de France. Le gouvernement roumain réclame lui une stratégie européenne, seule à même selon lui de répondre durablement "aux problèmes et aux attentes" des 10 à 12 millions de Roms en Europe.


mercredi 8 septembre 2010

Roms : la Commission et le Parlement européens rappellent la France à l'ordre



C'est au Parlement que les attaques contre la politique française vis-à-vis des Roms ont été les plus dures. Les groupes libéral, socialiste, vert et communiste du Parlement ont présenté des projets de résolution condamnant les expulsions de citoyens roumains et bulgares vers leur pays d'origine par les autorités françaises. Un vote doit intervenir jeudi sur la question.

Reconduites de Roms en France : le Parlement appelle l'UE à agir

Lors d'un débat sur la situation des Roms, les députés du groupe PPE ont souligné le besoin d'une action renforcée de l'UE pour l'inclusion des Roms, et les groupes S&D, ALDE, Verts/ALE et GUE/NGL ont condamné les mesures prises par le gouvernement français jugées discriminatoires et en infraction au droit communautaire. La légalité des mesures prises par la France doit encore être évaluée, a indiqué la Commissaire Reding. Les députés adopteront une résolution jeudi.

Représentant le Conseil, le Secrétaire d'Etat belge aux affaires européennes, Olivier Chastel, a réaffirmé l'attachement du Conseil aux "valeurs et principes des Traités" et au "respect de l'Etat de Droit, y compris des droits des minorités". Il a rappelé qu'il revient aux Etats membres de soutenir l'inclusion des Roms. "Il doit y avoir liberté de mouvement, et les Roms ne doivent pas être victimes de discrimination".

La commissaire en charge de la justice et des droits fondamentaux, Viviane Reding, a déclaré que "les Etats membres sont en charge de l'ordre public et doivent assurer la sécurité" de leurs citoyens, mais que les mesures prises doivent être proportionnées. Mme Reding a dit avoir pris note des assurances fournies par les autorités françaises selon lesquelles les Roms ne seraient victimes d'aucune discrimination. Cependant, ses services "vérifient si ce qui a été dit reflète la réalité sur le terrain" a-t-elle déclaré. "Nous avons identifié un certain nombre de points sur lesquels les autorités françaises devront nous fournir davantage d'informations" a-t-elle ajouté.

Lívia Járóka (PPE, HU) a rappelé que les expulsions ne peuvent être décidées qu'au cas par cas. Elle a souligné que "personne ne doit être expulsé au seul motif d'être Rom" et que les expulsions collectives "pouvaient choquer", mais au même titre que l'inaction face à la pauvreté et l'exclusion sociale des Roms. Elle a souligné l'importance de renforcer l'inclusion des Roms par le biais d'une stratégie européenne.

Hannes Swoboda (S&D, AT) s'est dit déçu de la réponse "peu claire" de la Commission. "Cela est scandaleux, je veux savoir si les autorités françaises ont enfreint le droit européen ou pas" a-t-il déclaré, craignant que d'autres pays, "peut-être l'Italie ou la Hongrie", puissent s'inspirer de la France.

Renate Weber (ADLE, RO) a estimé que la France "piège" les Roms en leur proposant de l'argent pour quitter le pays. Les autorités françaises "appellent cela le retour volontaire" mais il s'agit en fait d'une "claire violation du droit européen et international". Elle a ajouté que la Commission devrait démontrer qu'elle est réellement la gardienne des Traités.

Hélène Flautre (Verts/ALE, FR) a demandé pourquoi la commissaire Reding, après plusieurs réunions sur ce dossier, n'a "toujours pas d'opinion claire". Demandant si la Commission avait besoin de davantage d'experts et de preuves pour juger la situation inacceptable, elle a invité l'Exécutif à "cesser de se refuser à prendre ses responsabilités".

Timothy Kirkhope (ECR, UK) a invité ses collègues à attendre que la Commission rende un avis formel sur la situation. "Alors nous pourrons juger sur la base des faits et décider comment nous consacrer à une meilleure intégration des Roms, plutôt que de condamner un Etat membre par avance". Il a par ailleurs souligné que "ce continent ne doit jamais raviver les fantômes des nationalismes passés".

Cornelia Ernst (GUE/NGL, DE) a déclaré que "Sarkozy viole le droit européen, la libre circulation des personnes et la Charte des Droits fondamentaux". "Je voudrais que cessent ces expulsions" a-t-elle insisté, mentionnant également des cas similaires en Autriche, en Allemagne et en Italie. "Le Parlement doit combattre cela" a-t-elle conclu.

"Tout cela est un prétexte", a déclaré Mario Borghezio (EFD, IT), estimant que "La Roumanie et la Bulgarie n'ont pas résolu leurs problèmes à domicile". Les Roms "doivent observer la loi" a-t-il ajouté. "Les citoyens de l'UE sont victimes de leurs crimes et n'apprécieraient pas d'avoir des Roms dans leur voisinage, il faut aussi avoir le courage de dire cela" a-t-il ajouté.

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Le gouvernement français a dénoncé ces attaques de la part de certains députés européens. "J'ai trouvé des propos, dans la bouche d'eurodéputés, totalement excessifs et injustes à l'égard de la politique de la France à l'égard des Roms", a affirmé Pierre Lellouche, le secrétaire d'Etat français aux affaires européennes. M. Lellouche, qui doit se rendre jeudi et vendredi à Bucarest avec le ministre de l'immigration, Eric Besson, a de nouveau mis en cause la Roumanie, d'où vient l'immense majorité des Roms qui cherchent à émigrer vers l'Europe de l'Ouest.

LA COMMISSION EUROPÉENNE PLUS CLÉMENTE

De son côté, la Commission européenne, qui avait été interpellée sur la question des expulsions de Roms en France, a été moins dure que les eurodéputés. Tout en rappelant que les Roms ne devaient pas devenir des "boucs émissaires", la commissaire européenne chargée de la justice, Viviane Reding, s'est déclarée satisfaite des "garanties" que lui a fournies le gouvernement français pour justifier sa politique de reconduction.

La Commission européenne a cependant demandé à la France de donner force de loi aux garanties de procédures accordées aux personnes expulsées par le droit communautaire. Selon des sources proches de la Commission, la France n'a pas intégré ces éléments prévus dans une directive de 2004 sur la liberté de circulation dans l'Union européenne en estimant qu'ils découlaient de sa jurisprudence. Ces garanties concernent le délai d'un mois dont doit bénéficier toute personne visée par une mesure d'expulsion ou le principe de "proportionnalité" qui exige de prendre en compte la situation de la personne au regard de la décision qui la touche.

www.europarl.europa.eu/news/expert/infopress.../default_fr.htm

http://sebastiengehan.blogvie.com/files/2010/09/le_peril_rom-d9099.jpg
Encore un peu de temps et les Roms seront devenus des..."terroristes" !

lundi 6 septembre 2010

Rroms : des élus qui bougent. Il est bien temps !



Douze élus d'Ile-de-France interpellent le premier ministre après l'annulation par le ministre de l'immigration et de l'identité nationale des réunions prévues avec les élus locaux pour tenter de trouver un moyen d'accueillir dignement les Roms dans la région parisienne.


Monsieur le Premier Ministre,

Depuis de nombreux mois, nous saisissons régulièrement les membres de votre gouvernement, ainsi que les Préfets, sur la situation catastrophique des Roms vivant en Ile-de-France.

Nous avons demandé, à de multiples reprises, la tenue d'une table ronde sur cette question et la création d'une mission régionale de traitement socio-économique des campements Roms qui soit pilotée par l'Etat et à laquelle seraient associées les collectivités locales concernées et les associations qui agissent aux côtés des Roms.

Début juillet, M. Besson, ministre de l'immigration et de l'identité nationale, nous a proposé d'organiser une réunion entre les ministères concernés et les élus locaux. Quoique ne correspondant pas exactement à notre demande, cette rencontre aurait permis aux collectivités de l'Ile-de-France de dialoguer avec les services de l'Etat sur une question qui les concerne au premier chef. Nous avions formé à cet effet une délégation d'élus locaux, de tous les départements d'Ile de France, tous impliqués de longue date sur la question Rom et avec une large représentation politique.

Nous espérions notamment que cette première réunion dont la date avait été fixée au 7 septembre 2010, serait suivie de propositions concrètes pour un accueil digne des populations Roms en France.

Nous protestons vivement contre la décision désinvolte d'annuler cette réunion qui vient de nous être signifiée par mail, « en raison de la préparation de l'examen fin septembre par l'Assemblée nationale du projet de loi immigration, intégration et nationalité et d'un calendrier extrêmement chargé tout au long de septembre ».

Cette annulation unilatérale intervient dans un contexte particulièrement dramatique de durcissement de la répression envers les Roms, avec, dans des conditions inacceptables, le démantèlement des campements et des expulsions massives organisées, expulsions dont les conséquences désastreuses pour les populations sont principalement gérées par les collectivités locales. Nous ne pouvons y voir qu'un signe supplémentaire, s'il en fallait encore un, de la volonté du gouvernement de ne traiter la question des Roms que sous un angle sécuritaire et répressif, en refusant de réfléchir à toute forme de prise en charge sociale et humanitaire ainsi qu'à tout règlement diplomatique.

Votre gouvernement semble renoncer au dialogue avec les élus locaux, alors que nous sommes en premier lieu concernés, dans nos villes et sur nos territoires, par l'installation des campements Roms, que nous menons des expériences novatrices auprès de ces populations en vue de leur intégration et de leur insertion professionnelle. Nous savons qu'avec une véritable solidarité régionale, nationale et européenne, il est tout à fait possible d'accueillir dignement ces femmes, hommes et enfants, citoyens européens qui, rappelons le, ne seront plus sous le coup des mesures transitoires qui restreignent aujourd'hui leur accès au marché du travail, au plus tard fin 2013, d'autant qu'il est dans les prérogatives des Préfets de déroger plus favorablement à ces mesures. L'Etat doit, aujourd'hui, en appeler à l'Union Européenne pour que des politiques efficaces de lutte contre les discriminations soient mises en uvre dans des pays d'origine des populations Roms.

Nous ne considérons évidemment pas que les occupations illégales de terrains et la construction de véritables bidonvilles, avec tous les risques que cela comporte pour ces familles, en particulier les risques d'incendie, soient une solution. Nous souhaitons que l'Etat assume ses responsabilités, tout comme bon nombre de collectivités locales assument les leurs, afin que des solutions de fond soient examinées et que cesse la politique qui consiste à renvoyer les familles d'un camp à un autre, et les condamne, à chaque expulsion, à toujours plus de précarité. A l'approche de l'hiver, nous demandons que des solutions d'hébergement dignes soient proposées, sur l'ensemble de l'Ile de France, à ces populations, notamment dans le cadre du Plan régional d'accueil d'hébergement et d'insertion(PRAHI).

Nous protestons contre la stigmatisation des ces populations et ne tolérons pas que la politique que nous menons soit qualifiée de « laxiste ».

Nous en appelons donc à votre responsabilité pour maintenir cette réunion et mettre fin à l'instrumentalisation médiatique d'une politique visant à stigmatiser toute une population, confirmant en cela vos récentes déclarations.

Michel BISSON, Maire de Lieusaint
Patrick BRAOUEZEC, Président de Plaine Commune, Député
Alain DESMAREST, Premier Vice-président du Conseil général du Val de Marne
Bertrand KERN, Maire de Pantin, Président de la Communauté d'Agglomération Est Ensemble
Didier PAILLARD, Maire de Saint-Denis, Vice-président de Plaine Commune
Jacques PERREUX, Vice-président du Conseil général du Val de Marne
Gilbert ROGER, Maire de Bondy, Premier Vice-président du Conseil Général de Seine-Saint-Denis
Jacques SALVATOR, Maire d'Aubervilliers
Olga TROSTIANSKY, Adjointe au Maire de Paris
Didier VAILLANT, Président de la Communauté d'Agglomération Val de France
Bernard VINCENT, Vice-président de Plaine Commune
Dominique VOYNET, Sénatrice-Maire de Montreuil


http://www.mediapart.fr/club/edition/les-invites-de-mediapart

vendredi 3 septembre 2010

Flaubert et les "Bohémiens"

« Je me suis pâmé, il y a huit jours, devant un campement de Bohémiens qui s'étaient établis à Rouen. Voilà la troisième fois que j'en vois. Et toujours avec un nouveau plaisir. L'admirable, c'est qu'ils excitaient la Haine des bourgeois, bien qu'inoffensifs comme des moutomiens"lis mots à la Prudhomme. Cette haine-là tient à quelque chose de très profond et de complexe. On la retrouve chez tous les gens d'ordre. C'est la haine qu'on porte au Bédouin, à l'Hérétique, au Philosophe, au solitaire, au poète. Et il y a de la peur dans cette haine. Moi qui suis toujours pour les minorités, elle m'exaspère. Du jour où je ne serai plus indigné, je tomberai à plat, comme une poupée à qui on retire son bâton. »

« Correspondance » de Gustave Flaubert -
lettre à George Sand, 12 juin 1867 - éd. de la Pléiade - tome 5, pp. 653-654.


jeudi 2 septembre 2010

Politique du pouvoir à l’encontre des Roms en France : Attention Danger !

MARIE JOSÉ CHOMBART DE LAUWE, RÉSISTANTE DÉPORTÉE, PRÉSIDENTE DE LA FONDATION POUR LA MÉMOIRE DE LA DÉPORTATION

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Mercredi 1er septembre 2010

Déclaration de Madame Marie José CHOMBART de LAUWE, Résistante Déportée, Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation qui alerte sur les dangers de la politique du pouvoir à l’encontre des Roms dans notre pays.

Attention danger !

L’Etat français est en charge de fonctions régaliennes, dont font partie la sécurité extérieure et la sécurité intérieure du pays, nul ne le conteste. L’histoire du XX° siècle marquée par les crimes de masse et les persécutions et génocides touchant les Juifs et les Tsiganes impose toutefois un regard rétrospectif dès lors que certains propos menacent l’âme du pays et sa cohésion.

L’instrumentalisation des thèmes sécuritaires dans le discours politique actuel doit être décryptée et dénoncée.

Le général de Gaulle évoquait la nécessité de hisser sans cesse la France vers les sommets. Les déclarations récentes entendues aux plus hauts niveaux de l’Etat la tirent plutôt vers le bas. Des vagues d’indésirables ?

La France a vécu des épisodes migratoires antérieurs. Elle n’en n’est pas morte…mais n’a pas non plus lieu de se glorifier de la manière dont elle les a accueillis et traités. Faut-il rappeler les réticences d’une grande partie de la population française à l’égard des Républicains espagnols réfugiés de la Retirada, ces « gens sales, illettrés, voleurs et paresseux qui venaient ajouter aux difficultés quotidiennes de la vie des bons Français et manger leur pain » ? C’était le discours repris par une certaine droite nationaliste, xénophobe et égoïste. Sans parler de l’embarras des pouvoirs publics totalement dépassés par un exode massif qu’ils s’étaient refusé à voir venir et qui déboucha sur la constitution des premiers grands camps d’internement.

L’on sait par la suite les pressions exercées pour contraindre cette population réfugiée à rentrer « volontairement » chez elle, où le régime fasciste de Franco l’attendait de pied ferme. Le rapprochement permet des doutes sérieux sur la notion de « retour volontaire ». A l’opposé de ce discours, la ferveur populaire d’une partie de la France, cette France là, anonyme et modeste, qui s’est mobilisée pour venir en aide aux réfugiés espagnols, a incarné l’honneur de la République. Pas si indésirables…

Est-il nécessaire de rappeler la part courageuse et exemplaire prise à nos côtés dans la guerre contre l’Allemagne nazie par ces « gens sales, illettrés voleurs et paresseux » restés malgré tout en France, leur engagement dans la Résistance contre l’occupant après la défaite, celui héroïque de groupes espagnols dans les combats du plateau des Glières ou encore le prix très lourd payé par près de 7 000 autres, prisonniers de guerre, ignorés honteusement par le Régime de Vichy et abandonnés à l’Allemagne nazie qui les traita en « apatrides » et les déporta, principalement au camp de concentration de Mauthausen, dont la plupart ne sont jamais rentrés ?

Faut-il rappeler que des soldats de la 2ème Division blindée entrés les premiers à Paris avec la colonne Dronne, étaient des …Espagnols ? Ce seul exemple devrait inciter à la prudence et à la retenue dans le discours.

Une extermination que l’on occulte un peu vite

Les populations Sintis, Roms, Manouches, Gitans, qualifiées globalement de Zigeuner (Tsiganes) par le régime nazi et classées dans la catégorie la plus basse des « sous-hommes », ont fait l’objet d’un génocide tout aussi systématique en Allemagne et en Europe centrale occupée, que celui des Juifs et ont subi des expérimentations médicales d’une cruauté qui font encore frémir la mémoire des survivants. En France elles furent visées surtout par la honte et la misère de l’internement administratif.

On en parle moins, voire pas du tout, cette population étant discrète, effacée et peu prolixe. Qui s’en souvient aujourd’hui ? Qui a évoqué ce martyre passé ? A lui seul pourtant ce rappel justifierait des égards, marques de considération et de soutien, voire réparations, comparables à ceux consentis à d’autres. Qui y songe ?

Le cycle des violences de masse en marche ?

Jacques Sémelin , auteur d’une encyclopédie sur les violences de masse, insiste sur le rôle des représentations, qu’il situe en amont de ce processus. Pour lui, le massacre est le résultat d’une démarche mentale créant un « imaginaire de l’ennemi opposé à l’imaginaire de soi », instaurant une perception négative de l’Autre dans l’imaginaire collectif. Chaque être humain peut avoir des fantasmes de destruction de l’autre.

Dans le cas du crime de masse ces fantasmes basculent dans la réalité collective. Il tente en conséquence d’analyser l’articulation entre imaginaire et réel, où l’exploitation de la peur et de l’inquiétude facilite la définition d’entités mythiques à partir desquelles se construisent en interaction un « Eux », figuratif de l’ennemi et un Nous, censé incarner le bien. Il place à l’origine du processus le discours des leaders d’opinion (politiques, intellectuels, médiatiques ou religieux) proposant chacun leur lecture de la situation, comme par exemple : le pays ne va pas bien, mais si nous commencions par nous débarrasser de ces gens là ça irait beaucoup mieux.

Un discours globalisant et accusateur irrecevable

C’est ce discours là, aménagé, mais emprunté à l’extrême droite française, qui tend aujourd’hui à s’imposer dans l’appareil d’Etat et qu’il faut dénoncer. En désignant dans un même discours, les « gens du voyage et les Roms » comme facteurs d’insécurité, le Chef de l’Etat divise la collectivité nationale, crée des entités négatives jugées « indésirables » opposées à des entités positives imaginaires.

Il flatte les égoïsmes et exacerbe les crispations identitaires qui s’opposent, bref dresse les Uns contre les Autres. Lorsqu’il parlait de la « racaille » (entité mythique sans consistance, auquel chacun donne le contenu qu’il veut bien selon ses fantasmes) il « la » livrait déjà à la vindicte populaire. Il eût été plus noble de mobiliser la collectivité nationale pour trouver les voies et moyens possibles d’une intégration économique et psychologique réussie, en tout cas d’une insertion dans la vie active. Cela n’exclut nullement les poursuites pénales individuelles, exercées sous l’autorité du pouvoir judiciaire et non de l’exécutif, dès lors qu’elles sont justifiées, ni la recherche de solutions à l’échelle européenne. Mais que la France, souvent prompte à donner des leçons, donne d’abord l’exemple en l’Europe, à l’heure où les ultranationalismes refont surface un peu partout, avec tous les dangers dont sont potentiellement porteurs leurs égoïsmes et leur violence.

La France n’a pas les moyens ?

S’exprimant il y a quelques semaines sur France Culture, le ministre des affaires européennes, Pierre Lellouche, ancien Haut-représentant de la France en Afghanistan, tenait un discours à deux vitesses, dont la distorsion entre des propos constructifs à l’égard de l’Afghanistan, justifiant la présence française, une pédagogie à développer à l’égard du peuple Afghan, décrivant les menaces que cette région fait peser sur la sécurité du monde et l’aide indispensable à apporter à l’armée nationale afghane etc., contrastaient avec les propos soudainement raidis, brutaux et accusateurs visant les quelques Roms installés dans sa circonscription électorale du 3ème arrondissement de Paris. Il n’était soudain plus question de pédagogie : seulement d’opprobre, de dénonciation collective et d’exclusion. Exigences d’un certain électorat qui tendrait à se dérober?

Ainsi donc la France aurait les moyens de soutenir une guerre lointaine à l’issue bien incertaine en faveur du peuple Afghan et serait incapable de dégager quelques moyens humains, financiers et citoyens autres que sa Police, en faveur de quelque 15 000 Roms ?

Les signaux de l’histoire

Le chef de l’Etat pourrait méditer d’autres signaux de l’histoire. Pétain s’était voulu lui aussi recours et « référence » d’une France abasourdie par sa défaite militaire et privée de repères et de perspectives. Il a alors élaboré le concept d’anti-France. Après avoir bénéficié quelque temps de la confiance des Français, il la perdit lorsque leurs yeux se sont enfin ouverts sur les grandes rafles de Juifs. Une vague réprobatrice monta alors « de la France d’en bas ».

Le haut-le-cœur des consciences d’aujourd’hui contre la chasse aux Roms et les mesures touchant « les gens du voyage », exécutées sans état d’âme par des fonctionnaires disciplinés, marque le début d’un réveil des consciences. Il prouve que notre pays a encore un cœur et des tripes. Soyons en fiers. C’est aussi cela l’âme de la France ! Appeler les Français à la solidarité pour aider et encadrer les Roms aurait une autre tenue et une autre valeur symbolique.

L’ethnologue, ancienne déportée, Germaine Tillion ne disait-elle pas dans un de ses derniers entretiens que le désespoir faisait le lit des terroristes en puissance ? Sémelin l’exprime autrement en mettant en garde contre les représentations négatives qui font de gens ordinaires des assassins en puissance.

Où est passée la devise de la République ? La désobéissance civique comme forme de résistance à de telles dérives pourrait bien devenir l’ultime recours des consciences qui restent lucides dans la tourmente.

Marie José Chombart de Lauwe

Résistante déportée

Grand officier de la Légion d’Honneur

Directeur de recherche honoraire du CNRS

Présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation


Sans commentaire.

Le Collectif de soutien aux familles rroms de Roumanie

mercredi 1 septembre 2010

Le boumian


En provençal on dit "lou boumian" et "la boumiano". Le terme "boumian" relève d'un fait historique : le comte de Provence a repoussé les Tziganes et les vagabonds et les a contraints à vivre, durant un demi siècle, dans le massif de la Sainte Baume. Quand ils ont enfin pu quitter la montagne, les gens qui les découvrirent les appelèrent les "boumian", que l'on peut traduire littéralement par "les habitants de la Baume".

Ce haut lieu aurait abrité Sainte Marie Madeleine dans une grotte qui, aujourd'hui, est devenue un sanctuaire. Autre lieu provençal de pèlerinage des gens du voyage : l'église des Saintes-Maries-de-la-Mer. Ils y célèbrent, tous les ans, au mois de mai leur patronne, Sainte Sara, servante noire de Marie Salomé et Marie Jacobé.

L'histoire entre la Provence et les "gens du voyage" fait donc que cette famille "nomade" et marginale trouve sa place dans la crèche.

Le bohémien porte une grande cape noire dans laquelle il s'enroule et s'échappe quand les choses tournent mal. Sous son foulard rouge enroulé sur sa tête, ses cheveux sont longs et noirs tout comme ses grands sourcils et sa barbe. Un grand couteau est accroché à sa ceinture, toujours à porté de mains. On peut supposer qu'il cache sous sa cape une bourse remplie de pièces d'or qu'il aura gagné par de menus travaux (c'est un tondeur de chien, de chevaux, mais ils soignent aussi les animaux malades, on le dit guérisseur et savant) ou de petits larcins (on le dit voleur de poules). Les couleurs de ses vêtements sont "criardes".

La bohémienne porte un enfant emmitouflé entre son épaule et sa hanche gauche. Sa jupe est longue et noire, son haut très coloré. Un voile est noué sur sa tête. Elle joue du tambourin de la main droite. On dit qu'elle jette des sorts (notamment quand on ne veut pas acheter un médaillon de Sara, les mouchoirs qu'elle brode elle même, les paniers qu'elle confectionne...). Elle lit les lignes de la main, c'est une diseuse de bonne aventure.

Ce sont les nomades de la crèche, ils se déplacent avec leur roulotte et ne se sédentarisent jamais. Ils passaient à dates fixes dans les villes et les villages pour effectuer de petits travaux. Dans la crèche, ils sont souvent suivis de leur roulotte recouverte d'une bâche rouge, attelée à de vieux chevaux, à laquelle sont suspendus paniers, ustensiles de cuisine ... Le bruit en est assourdissant. De nombreux enfants sont dans le cortège. Certains de ces enfants sont blancs et non basanés. Ce sont les enfants que "les grandes dames" avaient illégitimement et qui leur étaient confiés moyennant finances. Les enfants sont sacrés pour les bohémiens, les "bâtards" étaient élevés exactement de la même manière que les autres enfants. De nombreux animaux suivent également ce cortège avec lesquels ils montent des spectacles pour gagner un peu d'argent (ours, singes...).

Le bohémien peut également être nommé "brigand", toujours à l'affût d'un mauvais coup. C'est le seul "méchant" de la crèche. Il a la réputation de voler les poules mais également de kidnapper les enfants. Dans ma jeunesse encore, mes vieilles tatas me disaient que "si je n'étais pas sage, le bohémien viendrait m'enlever et ne me ramènerait jamais dans ma famille".

Ces deux personnages font peur. Leurs savoirs dérangent et fascinent (soigneur pour lui, sorcière, diseuse de bonne aventure pour elle).

Santon du " voleur de poules".


Cela ne date donc pas d'hier. Le Rom, le Gitan, le Bohémien, le Boumian est un personnage au mieux inquiétant, au pire dangereux. Il y a de la délinquance dans cet homme-là et sa sulfureuse compagne n'est pas moins suspecte. Voilà le mythe qui nourrit encore les comportements des gadjé, aujourd'hui.