dimanche 27 mars 2011

De la "question prioritaire de Constitutionnalité" (1)

La "question prioritaire de Constitutionnalité", ou QPC, selon le Conseil d'État, est une question que "tout justiciable peut, depuis le 1er mars 2010, soutenir, à l’occasion d’une instance devant une juridiction administrative comme judiciaire, “qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit”, en application de l’article 61-1 de la Constitution".
http://www.conseil-etat.fr/cde/node.php?pageid=677

Et c'est ce que des Rroms de Sarcelles, par l'intermédiaire de leur avocat, M° Lemoine, ont fait, le 16 mars 2011. Le TGI de Pontoise pouvait ne pas transmettre cette QPC à la Cour de Cassation, seule à même d'apprécier l'opportunité de l'envoi de la question au Conseil Constitutionnel. Cependant, le 23 mars, au contraire, la Présidente du TGI a estimé recevable cette question et, a considéré avoir à la transmettre, sous huit jours, à la Cour de cassation.

Il y a là, pour les amis des Rroms, obligation de bien connaître où nous conduit cette procédure qui va très au-delà de l'audience concernant les Rroms de Sarcelles. Il s'agit de demander au Conseil Constitutionnel s'il existe une hiérarchie, entre deux droits garantis l'un et l'autre par la Constitution française, le droit de propriété et le droit de vivre en famille dans la dignité.



Que pouvons-nous savoir et comprendre ?

Le Conseil Constitutionnel fait effort de pédagogie pour aider les citoyens en donnant lui-même une définition de la QPC : "La question prioritaire de constitutionnalité est le droit reconnu à toute personne qui est partie à un procès ou une instance de soutenir qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. Si les conditions de recevabilité de la question sont réunies, il appartient au Conseil constitutionnel, saisi sur renvoi par le Conseil d'État ou la Cour de cassation de se prononcer et, le cas échéant, d'abroger la disposition législative. La question prioritaire de constitutionnalité a été instauré par la réforme constitu­tionnelle du 23 juillet 2008. Avant la réforme, il n'était pas possible de contester la conformité à la Constitution d'une loi déjà entrée en vigueur. Désormais, les justiciables jouissent de ce droit nouveau en application de l'article 61-1, de la Constitution. "

logo A la Une

Il y ajoute "douze questions pour commencer" qui éclairent le sujet :

http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/la-question-prioritaire-de-constitutionnalite/12-questions-pour-commencer.47107.html#2

Une plaquette de présentation, enregistrable sur le net, est proposée par le Conseil Constitutionnel.
http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/la-question-prioritaire-de-constitutionnalite/la-question-prioritaire-de-constitutionnalite-qpc.47106.html

Nous reviendrons, sans doute plusieurs fois, sur cette QPC dont la complexité ne doit pas nous arrêter. Ce texte est titré volontairement : "De la "question prioritaire de Constitutionnalité" (1). Il y aura donc d'autres textes : (2), (3) ...

Les avocats de Jacques Chirac ont eu recours à une QPC, mais, il ne faut pas y voir seulement une manœuvre dilatoire ! L'article 61-1 de la Constitution, amendée en 2009, demande un nouveau, lourd et utile travail au Conseil Constitutionnel. Il ne lui est pas permis pas de juger de la légitimité des lois, ni même d'examiner leur conformité à la Constitution (comme quand il est saisi par des parlementaires pour examiner une loi récente), mais seulement de dire, avec la QPC, si l'application de lois et règlements en vigueur s'est faite dans le respect de ce que la Loi fondamentale constitutionnelle garantit absolument.


lundi 21 mars 2011

Sucy en Brie : une action éclairante, un débat révélateur !

Il y a, parmi nous, deux minorités : celle des solidaires des Rroms et celle des adversaires. des Rroms Solidaires des hommes en difficultés ou adversaires des hommes qui ne vivent pas comme nous. Les uns soutiennent; les autres hurlent. Les troisièmes ... observent ! Au moment où s'expriment, dans les urnes, la peur et le rejet de l'autre, il est grand temps de comprendre que "ça commence avec les Rroms, mais après, à qui le tour... ?"

sucy-en-brie, hier. Le comité de soutien des Roms avait organisé   une journée portes ouvertes. Objectif ? Tenter de faire connaître la  situation de ces 34 personnes qui se retrouveront à la rue ce soir   apres avoir été accueillies par la paroisse Sainte-Jeanne.

À Sucy-en-Brie, des paroissiens aux militants syndicaux, les habitants se mobilisent pour venir en aide à des Roms. Les Roumains et les membres de leur comité de soutien ont manifesté ensemble, samedi 19 mars.

Sur le marché de Sucy-en-Brie (Val-de-Marne), samedi 19 mars, le bal des cabas a été dérangé par un inédit cortège : des habitants de la commune et des Roms ont défilé ensemble entre les étals, réclamant des mesures d'hébergement durable pour 34 étrangers qui vivent depuis deux ans, sur place, dans une extrême précarité.

La petite manifestation, qui visait à éveiller les consciences, n'a, de fait, pas laissé indifférent. Une centaine de personnes ont signé la pétition adressée à la mairie. Mais des invectives ont aussi fusé : " Qui c'est qui nous vole ? " ou " la France aux Français ! ".

Le Comité de soutien aux Roumains de Sucy n'émarge pas aux traditionnelles associations d'entraide. Ses membres ne sont pas des propagandistes chevronnés. Ils sont pharmacien, retraité de la banque, contrôleur de gestion, imprimeur, professeur des écoles ou négociant en vins, de gauche ou de droite. Des citoyens ordinaires, simples fidèles de la paroisse, qui ont noué des relations avec les squatteurs roumains. " J'ai appris à les connaître, raconte Blandine Lambert. Je me suis alors retrouvée non plus face à une abstraction, mais devant l'Homme. "

En novembre 2010, lorsqu'un arrêté d'expulsion a été placardé à l'entrée du terrain, les paroissiens ne sont pas restés les bras ballants. Les premières neiges ont hâté les résolutions. Elles ont fini de convaincre le Père Dominique Henry d'ouvrir, dans l'urgence, le relais paroissial Sainte-Jeanne, qui sert habituellement au catéchisme et aux activités des scouts. " Il aurait été scandaleux de laisser ces gens dehors dans le froid ", explique simplement le curé. Propriétaire du lieu, l'évêché a donné son accord.

Depuis lors, onze couples et douze enfants s'entassent dans les quatre pièces du petit local communautaire. Au mur, sont inscrits des plannings avec les noms des personnes chez qui les familles peuvent aller, en petits groupes, se doucher ou laver leur linge. Le comité apporte aussi un soutien scolaire aux enfants, se bat pour obtenir la scolarisation de ceux qui ne le sont pas encore.

Bravent-ils la légalité en aidant des étrangers en situation irrégulière ? " Je ne me suis jamais posé la question ", assure Jean-Paul Percher. " Si nous n'avions rien fait, il y aurait eu non-assistance à personnes en danger ", défend Patrick Angelvy. " Est-ce la chose la plus répréhensible en France que d'aider des gens à prendre des douches ? ", interroge Bruno Lambert. Depuis quatre mois, la cachette est, bien sûr, connue de la police, qui mène une surveillance discrète des activités du Comité.

Avec le temps, la mobilisation a largement dépassé le cadre confessionnel. Des hommes et des femmes de tous horizons ont rejoint le comité, du militant CGT à l'athée revendiqué. " Au sein des parents d'élèves, les opinions ont été très partagées. On nous a demandé pourquoi s'occuper de ces gamins plus particulièrement ", explique Gilles Coia, un responsable de la Fédération des conseils de parents d'élèves des écoles publiques (FCPE) qui a rejoint le comité. "Le côté composite de notre groupe fait sa force. On ne peut nous cataloguer. C'est un peu comme si Don Camillo et Peppone s'unissaient pour une cause ", assure Pierre Girard. Ce diacre refuse de mettre en avant ses valeurs chrétiennes : " J'ai simplement foi en l'homme. "

Mais aucune solution durable ne se dessine et la paroisse souhaiterait récupérer l'usage du local, début avril, pour ses activités. Formé de bonnes volontés, né de la nécessité, le Comité se retrouve dans une impasse juridique. Il s'est donc assuré le concours de militants plus aguerris, comme l'association Romeurope ou Amnesty International. François Taconet, responsable d'Habitats solidaires, une coopérative qui s'occupe d'hébergement social, propose de construire des bungalows en bois. Encore faut-il trouver le terrain et des aides publiques. " Ce n'est pas gagné ", reconnaît ce responsable, qui dénonce le côté " irrationnel " du débat sur les Roms.

La maire (UMP) de la commune, Marie-Carole Ciuntu, ne cache pas son embarras. " Il n'y a pas de solution qui se dégage ", admet cette élue, dont le père était lui aussi roumain. La présence des Roms exacerbe les passions chez ses 27 000 administrés et la maire oppose aux fermes admonestations du comité les plaintes du voisinage.

Elle rappelle que la commune recense déjà 300 demandeurs de logement social et compte deux autres camps illégaux sur son territoire. Elle redoute la création d'un " appel d'air ", comme cela a été le cas dans d'autres communes d'Ile-de-France. " Le comité de soutien est formé de gens de bonne foi, qui ont parlé avec leur cœur, mais qui ignorent le contexte général. La question des Roms est complexe et ne peut être résolue au seul niveau d'une commune ", plaide-t-elle.

10091601_PLANTU-X1PL_ori.jpg.567.jpg

http://www.leparisien.fr/sucy-en-brie-94370/l-operation-seduction-des-roms-14-03-2011-1357219.php

vendredi 11 mars 2011

L’article 90, (ex 32 ter A) de la loi Loppsi 2 : censuré !

L’expulsion administrative des habitations non conformes est retirée de la Loppsi 2 par le Conseil Constitutionnel.

Droit Au Logement salut la décision du Conseil Constitutionnel, (une fois n’est pas coutume...), de censurer l’article 90, (ex 32 ter A), contre lequel le DAL s’est battu depuis début septembre 2010. Il prévoyait d’expulser arbitrairement, en 48h, sur décision du préfet, sans le juge, les occupants d’habitations non conformes au code de l’urbanisme, et sur une procédure expéditive, de détruire leur habitation, y compris sur un terrain privé.

Les sans abris dans des cabanes, les familles du DAL sous des bâches ou des tentes, les Roms et les habitants de bidonvilles, les voyageurs sur des terrains à eux, les militants de l’habitat choisi, les habitant de mobil home sans autorisation, les habitant de camping à l’année, les auto constructeurs... vont souffler. Ils pourront au moins se défendre devant un juge, ne pas être expulsés en hiver, et préserver leurs biens... Ouf !

Les Ministres et les Préfets répresseurs, les Maires expulseurs et les voisins jaloux peuvent se rhabiller : le grand ménage des indésirables n’est pas encore à l’ordre du jour et le combat pour le Droit au logement pour tous l’est encore plus !

DAL qui a encouragé la mobilisation dès septembre 2010, salut les activistes, les réseaux et les associations, syndicats et organisations qui dans de nombreuses villes ont mis en place des campements, des manifestations, des interpellations des élus et de l’opinion, sur l’article 90 et en général la loi Loppsi 2. Rejoint dans ce combat par de nombreuses associations et de mouvement de lutte de précaires, de défense de l’habitat choisi, d’associations de défense des voyageurs, de syndicats de salariés, Droit Au logement rappelle que la lutte paye.

DAL salut également la censure d’autres articles particulièrement répressifs de cette loi fourre tout à caractère répressif, anti-pauvre, autoritaire, et pré fasciste, mais s’indigne que d’autres articles liberticides demeurent, tels que celui réprimant les vendeurs à la sauvette et les biffins, la création de milices paramilitaires et toutes les autres mesures de cette loi de propagande préélectorale.

http://www.droitaulogement.org/loppsi-2-l-article-90-ex-32-ter-a-retire-par-le-conseil-constitutionnel.html

Documents à télécharger

pdf
Article 90 de la Loi d’Orientation et de Programmation pour la Performance de la Sécurité Intérieure (Loppsi 2)
Arguments de La Fédération Droit Au Logement présentés au Conseil Constitutionnel
Document PDF (.pdf) - 49.8 ko - 10/03/11. Télécharger


LOPPSI 2 a déraillé...

LOPPSI 2 a dérailléLe Conseil constitutionnel a censuré, jeudi 10 mars, treize articles de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi 2) adoptée au Parlement le 8 février. C'est la première fois dans l'histoire de la Ve République qu'autant d'articles d'une loi sont censurés. C'est aussi un nouveau revers pour Nicolas Sarkozy et pour sa majorité, tant cette loi d'orientation devait permettre de traduire les orientations sécuritaires annoncées par le président de la République dans son "discours de Grenoble", le 30 juillet 2010.

De fait, le texte initial déposé par le gouvernement en mai 2009, qui comptait quarante-six articles, n'a cessé d'enfler au fil des lectures pour en comporter cent quarante-deux à l'arrivée. C'est sous l'impulsion du président de la République qu'un certain nombre de dispositions ont été intégrées après le discours de Grenoble.

Le Conseil constitutionnel a ainsi censuré l'article permettant au préfet de procéder à l'évacuation forcée de terrains occupés illégalement. Une disposition introduite à la demande du chef de l'Etat, pour marquer sa volonté de procéder à des évacuations de campements de Roms, qui autorisait à procéder dans l'urgence, à toute époque de l'année, à l'évacuation de personnes défavorisées et ne disposant pas d'un logement décent.

De même, le Conseil s'est opposé aux articles étendant aux mineurs l'application de "peines plancher" et autorisant leur comparution immédiate à la demande du procureur de la République sans saisir au préalable le juge des enfants. Il réaffirme ainsi la spécificité de la justice des mineurs, qui impose de prendre en considération leur personnalité et leur devenir.

L'INSTALLATION DE SALLES D'AUDIENCE AU SEIN DES CRA REFUSÉE

Censurées également, des dispositions accordant aux policiers municipaux des pouvoirs de police judiciaire, tels que la possibilité de procéder à des contrôles d'identité. Le Conseil a sérieusement encadré la possibilité de création de logiciels de "rapprochement judiciaire" permettant la mise en œuvre de traitements de données à caractère personnel recueillies à l'occasion d'enquêtes judiciaires. Ceux-ci ne pourront être autorisés que sur décision de l'autorité judiciaire et pour une durée de trois ans.

Le Conseil a aussi refusé l'installation de salles d'audience au sein des centres de rétention administrative, rappelant la nécessité de "statuer publiquement , c'est-à-dire qu'on n'installe pas des palais de justice à l'intérieur des prisons.

Enfin, la disposition réintroduisant une forme de "double peine" de telle sorte que le président de la cour d'assises demande aux jurés de se prononcer sur l'interdiction du territoire d'un condamné d'origine étrangère a été censurée.

En rendant cette décision lourde, le Conseil constitutionnel a mis un sérieux coup d'arrêt à un ensemble législatif qui, au milieu d'un vaste "fourre-tout", tentait de contourner à la fois la jurisprudence et des principes constitutionnels.

Patrick Roger
http://www.lemonde.fr/politique/article/2011/03/10/securite-le-conseil-constitutionnel-censure-des-articles-cles-de-la-loppsi-2_1491423_823448.html

Voir aussi :